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Ciné-CREA - 10 Novembre 2009: La Ballade de Bruno (1977) de Werner Herzog.

Chers amis,

Pour mardi prochain, le comité central du ciné-CREA a décidé d’introduire une figure majeure du cinéma allemand contemporain, à savoir Werner Herzog. A cet effet, et pour des raisons développées dans ce qui suit, nous avons choisi deux films, à savoir La Ballade de Bruno (1977) et Aguirre, la colère de Dieu (1972).
Si les films Wittgenstein et Derrida (déjà vus dans le cadre du ciné-CREA) décrivent deux déclinaisons différentes de ce que l’on pourrait appeler la typologie subjective formelle du philosophe critique (voir de celui qui veut guérir la pensée des « illusions transcendantales » qui le hantent et se vacciner contre l’errance spéculative et la folie métaphysique), ces deux films de Herzog déploient, comme le philosophe français Gilles Deleuze l’explique dans le texte que vous trouverez ci-dessous (et dans sa version intégrale ici), deux possibilités existentielles éperdument « non-critiques », à savoir celle du sujet « illuminé » qui veut réaliser ici et maintenant – sous la forme d’une auto-affirmation narcissique poussée jusqu’à la limite du racisme et de l’inceste – une idée impossible et démentielle, et celle du sujet « radicalement sans défense » qui, en suspendant jusqu’à la destitution subjective toute réappropriation narcissique, se laisse tomber « angéliquement » le long d’« une fibre [géodésique] d’univers ». Afin d’essayer de déceler les impasses propres à chacune de ces figures subjectives et d’envisager leur possible relève, nous vous invitons à partager avec nous ce mardi 10 novembre à 18h le film La Ballade de Bruno (dans la salle 28-R08 du CREA comme d’habitude).

Bien cordialement,
Le comité central du ciné-CREA.
Affiche

« Herzog est hanté par deux choses. Il est hanté par l’idée de quelqu’un qui concevrait une tâche démente et grandiose, et parce qu’elle serait démente et grandiose, il la réussirait, ou même la ratant, il la réussirait quand même. C’est une drôle d’idée, ça. Pourquoi ? Qu’est-ce que ça veut dire ? […] Ce n’est pas la situation qui impose une action grandiose, non, ça on s’en fout. Il faut qu’il nous présente un fou suffisamment fou pour avoir un projet grandiose ; dès lors, il est fondamentalement égal à l’action, il n’a même pas à devenir égal à l’action, il l’est. Il l’est, et il l’est dans sa certitude absolue. C’est le cogito de la folie, quoi. Et en un sens, plus cet acte, plus cette tâche sera démesurée, plus il lui sera égal. C’est une voie, il y a une autre voie. […] Imaginons des personnages qui soient égaux à l’action grandiose. Conditions : Il ne faut pas que l’action grandiose soit donnée comme à faire ; il faut qu’elle germe de leurs cerveaux, de leurs cerveaux illuminés. Ce sont des illuminés. […] Mais il a en même temps l’autre problème. Qui est : Comment imaginer des pauvres types ? Tellement pauvres types qu’ils suivent des débiles, des idiots qui s’accrochent à une ligne d’univers. […] Et ils seront complètement perdus car devant toute action, si minuscule à faire qu’elle soit, et devant toute situation réversible, ils seront radicalement sans défense. L’idiot sans défense, l’idiot radicalement sans défense, la créature radicalement sans défense d’une part. […] Il [Herzog] va nous faire tantôt une œuvre d’un type et tantôt une œuvre de l’autre type. […] Et alors qu’est-ce qui va se passer dans le cinéma d’Herzog ? Il va prendre les deux bouts, il va prendre, vous voyez, ces deux bords. […] Et la bordure, ça va être l’illuminé qui a une idée tellement folle que même échouant, il va l’exécuter. Et ça donne quoi ? […] C’est évidemment « Aguirre ». L’idée démente, non pas de trahir le roi, ça c’est rien, mais de tout trahir, arriver à tout trahir, tout. Comment tout trahir à la fois ? C’est pas facile ça, ça c’est vraiment une idée claire. Et l’idée n’est pas vraiment terminée : Comment tout trahir pour fonder ou refonder un empire originel de race pure constitué par l’union incestueuse de lui-même et de sa fille ? […] Passons de l’autre côté. Toutes ces espèces d’idiots, de génies et tellement émouvants, et tellement incroyables que Herzog crée. […] c’est les créatures sans défense. C’est lui qui impose au cinéma un type de personnes, de personnages tellement sans défense, tellement radicalement privés de défense qu’on en pleurerait, et en même temps ils marchent, ce sont des personnages qui marchent. Voilà qu’il a su faire passer dans de images très belles, à mon avis, l’idée, l’idée mystérieuse qu’il avait tout à l’heure : Il faut vraiment être un idiot pour marcher, et marcher c’est être sans défense. Mais je serai cet idiot là. […] Et dans ce qui pour moi est le chef d’œuvre de Herzog, « La ballade de Bruno », là nous est présenté le personnage qui par nature, il le dit tout le temps lui-même : « Je suis sans défense. Mon mal, c’est d’être sans défense. Le mal dont je souffre, c’est d’être sans défense. » […] Il s’agissait d’une absence de défense qui était non seulement physique mais métaphysique. Alors, alors là, « La ballade de Bruno »... Il suivra une fibre d’univers qui l’amènera de l’Allemagne en Amérique dans sa découverte, dans cette espèce de découverte de l’Amérique, c’est réellement la ballade au sens de poème chanté et de la balade, quoi. »

Gilles Deleuze

"La terre est bleue comme une orange. Jamais une erreur les mots ne mentent pas" (Paul Eluard, 1929)


Wittgenstein on 'Reddish-Green'
Remarks on Color
9. Even if green is not an intermediary colour between yellow and blue, couldn't there be people for whom there is bluish-yellow, reddish-green? I.e. people whose colour concepts deviate from ours—because, after all; the colour concepts of colour-blind people too deviate from those of normal people, and not every deviation from the norm must be a blindness, a defect.

Remarks on the Philosophy of Psychology, II
422. If I had taught someone to use the names of the six primary colours, and the suffix "ish" then I could give him orders such as "Paint a greenish white here!"—But now I say to him "Paint a reddish green!" I observe his reaction. Maybe he will mix green and red and not be satisfied with the result; finally he may say "There's no such thing as a reddish green."—Analogously I could have gotten him to tell me: "There's no such thing as a regular biangle!", or "There's no such thing as the square root of -25."

428. It is obvious at a glance that we aren't willing to acknowledge anything as a colour intermediate between red and green. (Nor does it matter whether this is always obvious to people, or whether it took experience and education to make it so.) What would we think of people who were acquainted with 'reddish-green' (e.g., who called olive-green by that name)? And what does this mean: "Then they have a different concept of colour altogether"? As if they wanted to say: "Well, then it wouldn't be this but a different concept of colour"—all the while pointing to our own. As if there were an object to which the concept belonged unequivocally.

429. These people are acquainted with reddish green. "But there is no such thing!"--What an extraordinary sentence.—(How do you know?)

Last Writings on the Philosophy of Psychology, I
"Nothing is as common as the colour reddish-green; for nothing is more common than the transition of leaves from green to red." (p. 59)

Derek



Ciné-CREA - 29 Septembre 2009: Wittgenstein (1993) de Derek Jarman.

Cher public,

Ce mardi 29 septembre à 19h, le cinéclub du CREA vous propose le film Wittgenstein (1993) du réalisateur anglais Derek Jarman (et scénario de Terry Eagleton).

Bien cordialement,
Gabriel.