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Café Müller (1978) Pina Bausch

Aliénations


(lien video)

L’autre-elle. À tâtons, déambuler, se cogner, se résigner à se déplacer sans aller nulle part, n’être nulle part. espèce errante. Partout ailleurs ; nulle part là. Battement insistant de son sang.

L’autre-pas-elle. Alouette. Miroiter, trépigner, se trémousser, errer, papillonner. Papillon a régné. Attirée par les lumières. Tiraillée de toute part. Aveuglée par la lumière. S’imager.

Elle. Aveuglée par la nuit. Indifférente se cogner. Bouleversée tourbillonner. Se déchirer. Envoutée marcher.

Lui. Le re-trouver inéluctablement. Silence. Suspension. Évidence.

Le corps soudain à la bonne taille. S’y coller. Y fusionner. S’y oublier. Comme la mort. Rester là. Garder ça.

Exigence de l’évidence. C’est là qu’il faut être.

L’autre-lui. La porter. C’est là qu’il faut t’être.

Elle. Tomber. Échouer. S’échouer.

Échec. Erreur. Errance.

L’autre-lui. L’ériger.

Lui. Se précipiter – se condenser en lui ; s’échapper en elle.

Se retrouver.

Se retrouver.

Elle. S’évanouir. S’évaporer. S’abandonner. S’oublier. Oublier.

Lui. Spasme. Douleur. Battement de son corps révolté enfermé.

Elle. La porter, l’ériger.

Elle. Le piétiner.

L’autre-pas-elle. Lui échapper. La retrouver, elle.

Elle. Qu’il enlace, supporte, soulève comme le cœur se soulèverait d’écœurement.

Lui. Qu’elle enlace, supporte, soulève comme le cœur se soulèverait d’écœurement.

Se cogner.

Se cogner. Comme si la destruction sauverait de la répétition

Elle. La retenir, la retenir enfin. La perdre. Encore.

Répéter puisqu’il s’agit d’oublier.



O let me weep, for ever weep

...


"O let me weep, for ever weep,
My Eyes no more shall welcome Sleep;

I'll hide me from the sight of Day,
And sigh, and sigh my Soul away.

He's gone, he's gone, his loss deplore;
And I shall never see him more."


CREACiné – 16 janvier 2012 : Café Müller (1978) de Pina Bausch


Chers collègues, chers amis,
Le cinéclub du CREA vous invite à la projection de la pièce Café Müller (1978, 45 minutes) de la chorégraphe allemande Pina Bausch le lundi 16 janvier à 19h30 à l'amphi Ferber (ENSTA, rez-de-chaussée). Voici quelques liens pertinents.
Bien cordialement,
Gabriel Catren.
affiche

Ménage à trois



Café Müller - Pina Bausch

« Je mettais entre l’homme et la femme un certain Autre qui avait bien l’air d’être le bon vieux Dieu de toujours, ce qui fait que jamais l’encore-à-naître ne donnera rien que de l’encorné. L’Autre comme lieu de la parole, était une façon, je ne peux pas dire de laïciser, mais d’exorciser le bon vieux Dieu. Je m’en vais peut-être vous montrer en quoi justement il existe, ce bon vieux Dieu. Pourquoi les matérialistes s’indigneraient-ils que je mette, pourquoi pas, Dieu en tiers dans l’affaire de l’amour humain ? Même les matérialistes, il leur arrive quand même d’en connaître un bout sur le ménage à trois, non ? » J. Lacan, Le Séminaire, livre XX. Encore.

De l’amour fusionnel, possessif, clos sur lui-même et fermé au dehors, amour visant à diluer les différences au sein d’un unique hermaphrodisme supra-narcissique, amour dont la fusion élimine tout espace interstitiel par lequel un tiers pourrait s’entremêler, amour qui étouffe l’interzone dans laquelle la danse pourrait avoir lieu, amour dans lequel les amants croient pouvoir renoncer à leur solitude, voire à l’abîme qui les sépare inexorablement, amour dans lequel la vue de chacun est cachée par l’autre même si tout est ouvert derrière l’autre (Rilke),… à l’inscription de l’amour dans le lien social, amour familial, renormalisé, socialisé et médiatisé par l’Autre symbolique, lequel met à la place de l’égalité fusionnelle impossible un rapport de dépendance imposé, stéréotypé, phallocentrique, inégalitaire et instable (dont la gestualité reproduit l’entrée des mariés dans la chambre nuptiale), rapport de dépendance dont la défaillance annoncée ouvre la possibilité de revisiter l’« amour » initial, défaillance des « rapports préfabriqués » par l’Autre qui permet de réinstaller pendant quelques instants l’étreinte fusionnelle perdue… jusqu’au moment où l’Autre peut désormais s’absenter car la « vie conjugale » s’est bien installée, oscillant entre la remémoration sporadique de la fusion impossible, close, narcissique, possessive et aveugle d’une part et les gestes stéréotypés, précaires, hiérarchiques et dépendants de l’autre. A chaque fois, on rate les Deux du rapport dansant, soit par l’Un prétendu de la fusion possessive, soit par le Trois du ménage.